Notre guide

Réveil à quatre heures du matin. On enfile nos chaussures gelées (il pouvait faire jusqu’à moins dix degrés la nuit, et la rosée du matin déposait une fine couche de glace sur nos affaires), et on commence la première ascension. Mes pieds sont frigorifiés malgré de bonnes chaussettes et j’avance péniblement, les yeux rivés au sol. Mon guide a des chaussettes en coton Nike toutes fines. Ça ne semble pas lui poser problème.

On souffle comme des buffles à chaque montée, mais lui, né dans le creux de cette chaîne de montagnes, à 4300 mètres, a un corps adapté aux conditions et grimpe avec élégance — des pas sûrs, rapides et puissants. Je lui ai demandé s'il souhaitait vivre plus bas un jour, à Huaraz — ville qui bourdonne de monde et de couleurs. Il m'a dit, “ici, il y a la vue, mon père, mon cheval, et de la truite. Tant qu'il y a de la truite, je suis content”.

On arrive dans son “village” : quatre huttes dans un champ près d’un lac au pied d’un glacier. Sa maison est sommaire : une simple cheminée dans une maison d'hobbit en pierre avec un toit de chaume, un sol de terre battue, un matelas de paille sur un lit taillé dans la roche. Une chaise, une table, rien de plus. Pas d'armoire. Pas de cuisine. Juste ce qu’il faut pour survivre.

Il pêche de la truite avec un bâton de bois et un asticot accroché au bout d'un fil, tel un Robinson Crusoé des montagnes. Il fabrique quatre cannes à pêche rustiques, et on s’y met tous. En trente minutes, il attrape une dizaine de truites. Nous, pas une.