9 mars - 4 avril 2019

Mompiche, Ecuador

Le bus

Un bus plein de joie de vivre, quittant la ville la plus dangereuse du pays, Esmeraldas. Un chanteur argentin enflammé se lève et joue de la guitare, les passagers se mettent à chanter en chœur !

On traverse des paysages émeraude, parsemés de minuscules maisons en bambou, si frêles qu'un coup de vent suffirait pour les ébranler.

Les dégâts du séisme de 2016 révèlent un quotidien difficile. La côte est couverte de restes de maisons écroulées, de gravats, de routes fissurées laissées à l’abandon. Certaines familles vivent encore dans des abris d’urgence : des bâches noires et des tôles ondulées font office de murs, et des morceaux de draps troués servent de toit. Le sol est couvert d’une simple couverture. Et pourtant, les enfants jouent en riant, les habitants sourient, les papis papotent assis sur un pneu au bord de la route. De la joie parmi les décombres.

Le chanteur s'arrête. Il récolte argent, friandises, sourires et remerciements. Le chauffeur met un film sur la télé du bus. Le volume est si fort qu'il est impossible de ne pas le regarder. À chaque arrêt, des vendeurs montent dans le bus pour vendre toutes sortes de curiosités : une crème contre le cancer, un collier pour trouver l'amour, des chocolats pour la chance et la prospérité. Ils laissent un "échantillon" dans les mains de chaque passager le temps d'un trajet, avant de le récupérer.

Je les regarde parler. Je découvre des visages aux traits inédits, des coupes de cheveux... étranges et dépassées, mais, des physiques beaux et fins, des yeux en amande, noirs aux longs cils, des dents éclatantes, une peau caramel, des nez petits, délicats et droits. Un mélange inattendu, européen, latino, africain.

L'arrivée : Le village.
19:00.

Une rue de poussière et de terre mouillée, glauque, déserte, à part une dizaine de chiens errants aux corps efflanqués.
Un motel sur la place centrale digne d'un film d'horreur.
Des lampadaires qui peinent à s'allumer.
Mais le bruit des vagues est là, tout près...

Je m'endors en espérant que la lumière du jour me peindra une meilleure image de ce que je venais tout juste de voir.
Le lendemain

Un ciel gris, humide, nuageux.

Mompiche a l'allure d'un ghost town... ses plages à marée basse sont jonchées de poissons morts, dont certains sont mortels si l'on marche dessus.Des raies, dont la piqûre est extrêmement douloureuse, peuplent les eaux et s'amusent à surprendre certains surfeurs. Un hostel délabré menace de s'effondrer face à "El Río", un des spots de surf à droite du village.

Mais quelque chose m'attire...

D’un coup, un sourire, un rire, un regard me révèlent les vraies couleurs de ce village à l'apparence lugubre.

Et il brille de mille feux !

Le ciel s'éclaircit, les rues sombres s'illuminent de charme et de rires, la mer nous donne ses plus belles vagues, douces, parfois trompeuses, sauvages et joueuses, avec lesquelles je vis tant de moments de bonheur. L'hostel abandonné nous invite à imaginer les histoires les plus folles en passant ses portes écrasées par la mer, pour y découvrir les objets de ses anciens occupants, rouillés par le sel mais toujours vivants de par leurs histoires.

Partout règne une joie de vivre resplendissante. Les habitants et voyageurs sont heureux ici. La simplicité opulente de leur vie quotidienne leur procure une vitalité contagieuse.







Mompiche nous rappelle que l'on n’a pas besoin de beaucoup pour être heureux, et que nos souvenirs les plus forts ne dépendent pas de la beauté d’un lieu. Nos plus beaux souvenirs peuvent être forgés dans un bidonville en Inde plutôt que dans une villa à Bali. Car au final, ce sont les gens que l’on rencontre qui rendent un endroit beau.

Chaque personne à quelque chose à nous apporter. Et c’est cet échange merveilleux qui fait du voyage en solo une expérience extraordinaire.




Pictures by @judithodm